En France, depuis plus d’un quart de siècle, les
gouvernements essaient de favoriser l’épargne retraite tant pour faciliter le
renforcement des fonds propres des entreprises que pour endiguer la baisse du
taux de remplacement des retraites par répartition. Mais, cette montée en
puissance de la capitalisation s’est effectuée bien souvent en catimini et sans
plan d’ensemble. La paysage de l’épargne retraite est de ce fait complexe,
constitué d’une multitude de produits. Les réticences idéologiques vis-à-vis de
la capitalisation ont freiné son développement en France. Le contexte
économique et financier mais aussi démographique a conduit à la fin de la
Seconde Guerre mondiale d’opter pour le tout répartition.
Les suppléments de retraite par capitalisation ne
représentent que 200 milliards d’euros quand l’encours de l’épargne réglementée
avoisine les 400 milliards d’euros et l’assurance vie 1 700 milliards d’euros.
12,7 millions de salariés ont accès par leur entreprise ou à titre individuel à
un produit d’épargne retraite soit 47 % de la population salariée occupée. Les
prestations servies aux actuels retraités par les contrats retraite
représentent, 2 % du total des pensions. Sur les 16 millions de retraités
recensés par la DREES en 2016, seulement 15 % bénéficient d’une rente viagère
issue d’un produit d’épargne retraite en plus de leurs pensions versées par les
régimes par répartition.
Nos partenaires économiques ont effectué un autre choix en
instaurant, bien souvent, des systèmes de retraite reposant sur trois piliers,
le premier étant celui de la répartition, le deuxième, celui des régimes
professionnels par capitalisation et le troisième celui de l’épargne retraite
individuelle. En moyenne, la capitalisation, au sein des pays de l’OCDE, assure
de 10 à 15 % des revenus des retraités.
Le poids monopolistique de la répartition n’est pas sans
conséquence pour le développement des entreprises. Pour se financer, elles ne
peuvent pas compter sur des fonds de pension nationaux, ce qui les oblige à
trouver des investisseurs étrangers exigeant bien souvent des rémunérations
élevées. De ce fait, les entreprises françaises sont contraintes de verser des
dividendes supérieurs. Compte tenu du niveau élevé du coût du travail, en
France, les marges de manœuvre pour éventuellement relever les cotisations
sociales retraite sont très faibles. Or, d’ici 2070, le nombre de retraités
devrait s’accroître, en France, de 10 millions. De ce fait, la diversification
des sources de revenus est indispensable pour endiguer la baisse programmée du
taux de remplacement des retraites par répartition. Selon le dernier rapport
annuel du Conseil d’Orientation des Retraites (rapport de juin 2018), le niveau
de vie relatif des retraités s’établirait entre 89 % et 95 % en 2040 et entre
77 % et 89 % en 2070, contre 105,6 % en 2015.
Les mesures relatives à l’épargne retraite prévues dans le
projet de loi PACTE (Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation de
l’Entreprise), présenté au Conseil des Ministres du 18 juin 2018, apportent
selon le Cercle de l’Épargne des réponses intéressantes aux problèmes exposés
précédemment.
Les objectifs du projet de loi sont la portabilité,
l’harmonisation et la simplification des différents produits d’épargne
retraite. La portabilité des différents produits d’épargne retraite permettra
de mieux prendre en compte la mobilité croissante des actifs. L’alignement pour
tous les produits d’épargne retraites des cas de sorties anticipées sur le
régime actuellement en vigueur pour le PERCO donnera la possibilité aux
souscripteurs d’utiliser cette épargne en vue de l’acquisition de la résidence principale.
Afin de ne pas créer de distorsions entre les différents
produits de retraite, les versements volontaires réalisés sur le PERP, PERCO,
contrat Madelin et article 83 bénéficieront, par ailleurs d’une déduction
fiscale dans la limite de l’enveloppe fiscale de l’épargne retraite
individuelle existante. Toujours dans un souci d’harmonisation, les épargnants
pourront opter pour une sortie en capital sur l’ensemble des versements
volontaires qu’ils auront réalisés.
Cette harmonisation et cette simplification ne constituent
pas une véritable refondation de l’épargne retraite. Elles s’inscrivent dans la
suite logique des dispositions prises depuis 2003. Cette réforme intervient
avant celle de la retraite qui est d’une toute autre ampleur. Ce toilettage de
la réglementation de l’épargne retraite intervient peut-être trop tôt où
signifie-t-il que le Gouvernement n’entend pas ouvrir le dossier d’ici 2022
afin de ne pas gêner la mise en œuvre du régime universel des retraites. La
simplification avancée ne sera pas obligatoirement au rendez-vous car plusieurs
régimes fiscaux pourront cohabiter au sein des nouveaux produits d’épargne
retraite. Certaines rentes pourront être à titre onéreux et d’autres à titre
gratuit. La question de la diffusion de l’épargne retraite au sein des PME
n’est pas réellement traitée. Des dispositifs de produits collectifs pouvant
être négociés au niveau des branches professionnels seraient mieux à-même de
couvrir les salariés des PME.
Le Gouvernement, à travers cette réforme, entend accroître
de 100 milliards d’euros l’encours de l’épargne d’ici 2022 ce qui peut
apparaître très ambitieux.
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