Apparue au XIXe siècle, la réversion s’est constituée, à l’origine, dans le
prolongement du devoir de protection dû à la femme par son mari, auquel
incombait, jusqu’en 1971, le statut de chef de famille en application de
l'article 213 du Code civil. C’est ainsi que ce droit qui a vu le jour au sein
de la fonction publique était initialement réservé aux femmes avant de
s’étendre progressivement aux veufs et d’être uniformisé entre les deux sexes
entre 1973 et 2004. La réversion est un sujet sensible. En effet, lié au décès
d’un conjoint, elle constitue un élément de la solidarité nationale. Par
ailleurs, elle permet de réduire fortement l’écart de pensions entre les hommes
et les femmes. Les pensions de ces dernières sont, en droit direct, de 39 %
inférieures à celles des hommes (données 2016). En intégrant les droits de
réversion, l’écart n’est plus que de 25 %.
Le système de la réversion a en commun avec celui des retraites, la
complexité. Les différents régimes ont retenu leurs propres règles. La situation
des conjoints survivants peut, de ce fait, différer en fonction de la carrière
professionnelle des conjoints décédés. Depuis de nombreuses années, l’idée
d’une refonte de la réversion est avancée par les pouvoirs publics et certains
partenaires sociaux. Avec le lancement de la réforme systémique du système de
retraite, la refonte de la réversion est incontournable.
4,4 millions de
bénéficiaires de droits dérivés
4,4 millions de pensions de droit dérivé sont versées par les
principaux régimes de base du secteur privé. Le nombre de bénéficiaires d’une
pension de réversion s’est accru de 6,4 % par rapport à 2006. Parmi ces
bénéficiaires, 1,1 million (soit un quart) ne perçoivent aucun droit
direct, soit parce qu’ils n’ont pas encore liquidé leurs droits propres, soit
parce qu’ils n’ont pas travaillé – du moins en France – ou pas
suffisamment longtemps pour recevoir à ce titre une pension sous forme de
rente.
2,8 millions de personnes perçoivent une pension de droit dérivé à la
CNAV et 2,9 millions à l’Arrco. Les régimes de base du secteur privé
(CNAV, MSA salariés, MSA non-salariés, RSI artisans et RSI commerçant) versent,
au total, 4,5 millions de pensions de droit dérivé, tandis que les caisses
de la fonction publique (fonction publique civile de l’État, fonction publique
militaire de l’État et CNRACL) en versent 0,6 million)
La proportion des femmes parmi les bénéficiaires d’une pension de droit
dérivé est de 89 %. Leur surreprésentation est liée à leur plus longue
espérance de vie et au fait qu’elles soient deux à trois ans plus jeunes que
leur conjoint. Par ailleurs, quand ils sont veufs, les hommes, en raison de
leur niveau de pension de droit direct souvent plus élevé que celui des femmes,
ont des revenus supérieurs aux plafonds de ressources pour être éligibles à la
réversion, quand celle-ci est soumise à condition.
Du fait d’un taux d’activité plus faible que les hommes, voire de l’absence
totale d’activité professionnelle rémunérée, les femmes représentent la
quasi-totalité des retraités ne touchant qu’une pension en droit dérivé (96
Fort logiquement, le nombre de bénéficiaires des pensions de réversion
croît avec l’âge entre 50 et 85 ans.
La réversion en
France, règles en vigueur
Le principe de
base
Le conjoint survivant peut bénéficier d’une pension de réversion sous
réserve de respecter des conditions d’âge et de ressources. Le conjoint divorcé
est assimilé au conjoint survivant qu’il soit remarié ou non. La pension est
partagée au prorata de la durée de mariage entre le conjoint survivant et les
précédents.
Les règles en
vigueur pour les régimes de base alignés (régime des salariés, indépendants,
agricole, professions libérales)
La date d’ouverture des droits à réversion
Pour les régimes de base, l’âge d’ouverture des droits de réversion est de
55 ans. Quand l’assuré est décédé avant le 1er janvier 2009, l’âge
minimum requis est de 51 ans quelle que soit la date de dépôt de la demande de
pension. Cette condition d’âge a fortement varié dans le temps. Elle était de
65 ans en 1945 et était passée à 55 ans en 1972 avant de descendre à 51 ans en
2007. Ce n’est que depuis 2009 qu’elle est revenue à 55 ans. La question de son
relèvement à 60 ou à 62 ans pourrait se poser.
Le plafonnement de la réversion en fonction des ressources
Pour bénéficier d’une pension de réversion dans un régime de base, le
montant de ses ressources ne doit pas dépasser, pour une personne seule, 2080
fois le SMIC horaire en vigueur au 1er janvier de l’année
considérée, soit 20 550 euros en 2018.
Le plafond pour un couple est égal à 1,6 fois celui d’une personne seule
soit 32 880 euros (1er janvier 2018). Le montant de la pension
de réversion est différentiel. Il
s’ajuste par rapport au plafond de ressources.
Les ressources prises en compte sont celles des trois mois civils précédant
la date d’effet de la pension de réversion. Quand ces ressources excèdent le
quart du plafond annuel, le calcul s’effectue sur la base des 12 derniers mois.
Toutes les ressources du ménage sont prises en compte pour déterminer si le
plafond est atteint ou pas à l’exception des assurances-vie et des capitaux
décès du conjoint décédé, de la valeur de la résidence principale et des
prestations familiales… Les ressources sont révisables chaque année.
Le taux et montant de la réversion pour les régimes de base
La réversion est calculée en pourcentage des droits « retraite » acquis par
le défunt. Ce taux est de 54 % de la pension principale dont bénéficiait ou
aurait bénéficié l’assuré décédé.
Le montant
maximum d'une pension de réversion est fixé à 10 727,64 euros par an, soit
893,97 euros par mois.
La majoration pour enfant et la majoration pour âge
Le titulaire de la pension de réversion peut bénéficier d’une majoration de
10 % s’il a donné naissance ou élevé au moins trois enfants pendant 9 ans avant
leur 16ème anniversaire. Le bénéficiaire doit être âgé de moins de
67 ans et ne doit pas être titulaire d’une retraite de base obligatoire. Cette
majoration entre dans le calcul du plafond de ressources.
La pension de réversion peut être majorée de 11,10 % si le titulaire a plus
de 67 ans. Il doit, au préalable, faire valoir tous ses droits à retraite.
La réversion dans la fonction publique, dans les
régimes spéciaux et pour les
avocats
Aucune condition d’âge et de ressources n’est prévue. Le taux de la
réversion est de 50 %.
Une durée minimale d’union de quatre ans est exigée dans la fonction
publique, de deux ans pour les régimes spéciaux et de 5 ans pour les avocats.
La pension est suspendue en cas de remariage, de PACS ou de concubinage en
ce qui concerne la fonction publique.
La réversion
dans les régimes complémentaires
Les régimes
AGIRC/ARRCO
A la différence des régimes de base, l’obtention d’une pension de réversion
n’est soumise à aucune condition de ressources. Il n’y a pas de limitation de
la pension en cas de cumul avec d’autres avantages vieillesse. Le droit à
réversion est simplement lié à une condition d’âge. Le conjoint survivant même
divorcé peut bénéficier d’une pension de réversion cumulable, le cas échéant,
avec un avantage personnel acquis dans ces régimes.
En cas de remariage postérieurement à l’attribution de la pension de
réversion, le service de celle-ci est supprimé de façon définitive à partir du
premier jour du trimestre suivant le remariage. Les orphelins de père et de
mère ont également accès à des droits de réversion.
Que ce soit pour l’ARRCO ou pour l’AGIRC, le conjoint survivant a droit à
une pension calculée sur la base de 60 % des points du conjoint décédé. Pour
l’ARRCO, l’accès à la pension de réversion est possible dès 55 ans. Pour l’AGIRC,
cet âge est de 60 ans. Les conjoints invalides ou ayant eu deux enfants à
charge peuvent obtenir une pension de réversion sans condition d’âge.
Quand il y a un seul ayant droit, la réversion est calculée sur le total de
la carrière de l’assuré décédé. Quand l’ex-conjoint est divorcé mais non
remarié, la réversion est calculée au prorata de la durée de mariage par
rapport à la durée d’assurance aux régimes de base du défunt. Quand la durée de
mariage est supérieure, l’ex-conjoint bénéficie de l’ensemble de la pension.
Quand il y a plusieurs ayants-droits, avec une coexistence du conjoint
survivant avec le (ou les) ex-conjoint(s) non remariés, la pension de réversion
est partagée entre l’ensemble des ayants-droits au prorata de la durée de
chaque mariage rapportée à la durée totale des mariages. Quand le partage
s’effectue qu’entre ex-conjoints non-remariés, la réversion est alors calculée
au prorata de la durée de mariage par rapport à la durée d’assurance au régime
de base du défunt.
Jusqu’au 1er janvier 2013, les commerçants et les artisans
n’étaient pas soumis aux mêmes règles en matière de réversion. Depuis le 1er
janvier 2013, les artisans, les commerçants et les industriels étant couverts
par le même régime complémentaire sont désormais régis, en matière de
réversion, par les mêmes règles.
Régime en vigueur jusqu’au 1er janvier 2013
- Réversion des commerçants
Pour bénéficier d’une pension complémentaire de réversion au titre du RSI,
le conjoint de l’assuré décédé devait
avoir été uni durant deux ans ou avoir eu au moins un enfant de cette
union. Le conjoint pouvait être divorcé mais pas remarié. Le conjoint survivant
ne doit pas avoir d’activité professionnelle. En cas de reprise d’activité, la
réversion est suspendue. La pension de réversion est égale à 60 % des droits du
conjoint décédé. Pour en bénéficier, le conjoint survivant doit avoir au moins
60 ans.
Le montant des pensions personnelles et de réversion ne doit pas dépasser
le plafond annuel de la Sécurité sociale. En cas de dépassement, la pension de
réversion est diminuée à due concurrence.
- La réversion des artisans
Pour bénéficier d’une pension de réversion, le mariage doit également avoir
duré deux ans ou un enfant doit être né de cette union. Le conjoint survivant
peut être divorcé mais pas remarié. Il peut avoir été marié mais être de
nouveau veuf.
La pension de réversion est égale à 60 % des droits de l’assuré décédé.
Elle peut être versée à partir de 55 ans et non 60 comme pour les commerçants.
La condition d’âge disparaît si le conjoint survivant est reconnu totalement et
définitivement invalide.
Des conditions de ressources sont imposées aux conjoints survivants. Le
montant de ressources ne doit pas dépasser le Plafond annuel de la sécurité
sociale. La pension de réversion est ajustée afin que le cumul de ressources
(pension de réversion comprise), soit inférieur ou égal à ce plafond (38 040
euros au 1er janvier 2015).
Le nouveau régime de la réversion complémentaire pour
les commerçants et artisans depuis le 1er janvier 2013
Depuis le 1er janvier 2013, un régime unique a remplacé les deux
précédents régimes. Les droits acquis au titre du régime complémentaire des
artisans et du régime complémentaire des commerçants sont conservés.
Les pensions de réversion des commerçants et des artisans sont accessibles
désormais, pour tous, à partir de 55 ans. La condition de durée de mariage est
supprimée tout comme la suppression du versement de la pension en cas de
remariage. Les conditions de ressources sont fixées à deux fois le plafond
annuel de la sécurité sociale soit 79 464 euros (au 1er janvier 2018).
Les conditions de réversion diffèrent selon les professions. Il convient de
se renseigner auprès de la section dont dépendait l’assuré décédé. En règle
générale, les pensions de réversion peuvent être versées entre 60 et 65 ans. Le
montant de la pension de réversion est fréquemment de 60 % des droits accumulés
par l’assuré décédé. Une durée minimale de mariage peut être exigée ou
l’existence d’un enfant issu de l’union.
La réversion
des notaires
Pour bénéficier d’une pension de réversion, le conjoint survivant du
notaire décédé doit justifier d’une durée minimale de mariage de 2 ans si le
mariage est célébré pendant l’activité professionnelle du notaire ou d’une
durée minimale de mariage d’au moins 5 ans à la date du décès. Si de cette
union un enfant est né, la condition de durée n’est plus exigée.
En cas de décès d’un notaire, soit en exercice, soit après cessation de ses
fonctions, le conjoint survivant peut bénéficier d’une réversion fixée à 60 %
des droits acquis par le défunt. Toutefois, la réversion de la complémentaire
du notaire décédé peut être de 100 % si ce dernier en avait fait la demande à
la liquidation de ses droits à retraite.
La pension de réversion peut être versée à partir du 50ème
anniversaire du conjoint si le décès est survenu avant le 1er
janvier 2014. Le conjoint survivant devra attendre son 52ème
anniversaire si le décès du notaire survient après le 1er janvier 2014.
Si le défunt laisse, soit un conjoint survivant et un ou plusieurs
conjoints divorcés et non remariés, soit un ou plusieurs conjoints divorcés et
non remariés, la réversion est partagée entre les intéressés au prorata de la
durée de chaque mariage. La réversion est suspendue en cas de remariage et ne
pourra être rétablie qu’en cas de veuvage ou de divorce. Aucune condition de
ressource n’est exigée pour l’attribution des droits à réversion.
La réversion
des officiers ministériels
Pour bénéficier de la réversion du régime complémentaire, le conjoint
survivant doit justifier de deux années de mariage ou de de la naissance d’un
enfant durant l’union. En cas de coexistence d’un conjoint survivant et un ou
plusieurs conjoint(s) divorcé(s) non remariés, le partage se fait au prorata de
la durée de chaque mariage. La condition d’âge pour pouvoir bénéficier de la
réversion de la retraite complémentaire de l’officier ministériel décédé est
fixée à 60 ans. La pension de réversion du régime complémentaire n’est pas
soumise à une clause de ressources.
La réversion
des médecins
Pour bénéficier de la réversion du régime complémentaire de la CARMF (La
Caisse autonome de retraite des médecins de France), le conjoint survivant doit
justifier de deux années de mariage ou de la naissance d’un enfant durant
l’union. En cas de coexistence d’un conjoint survivant et d’ex-conjoints
divorcés non remariés, le partage se fait au prorata de la durée de chaque
mariage. Le partage est établi définitivement, c’est-à-dire qu’au décès de l’un
des conjoints, sa part n’accroît pas la part de l’autre ou, s’il y a lieu, des
autres. Pour bénéficier de la réversion le ou les conjoints survivants non
remariés doivent avoir au moins 60 ans. Le montant de la réversion s’élève à 60
% du montant de la pension qu’aurait perçue le médecin décédé.
Si le médecin décédé n’était pas à jour des cotisations, aucun droit à
pension ne pourra être ouvert avant la régularisation intégrale du compte.
Par ailleurs, le conjoint survivant d’un médecin non retraité a la
possibilité de procéder à un rachat de points portant sur la validation des
années d'exercice libéral antérieures au 1er juillet 1949 (date de
création du régime) et des périodes militaires. Si le médecin décédé était une
femme, le ou les conjoints survivants peuvent également valider les trimestres
pour les enfants nés durant l’activité médicale de celle-ci. La pension de
réversion du régime complémentaire n’est pas soumise à une clause de
ressources.
La réversion
des pharmaciens
Pour pouvoir bénéficier de la pension de réversion au titre de la retraite
complémentaire gérée par répartition du pharmacien décédé, le conjoint
survivant doit être âgé de 60 ans et avoir été marié au moins deux ans ou avoir
eu au moins un enfant pendant le mariage. En cas de coexistence d’un conjoint
et/ou d’ex-conjoints survivants non remariés, la pension est partagée au
prorata de la durée des mariages respectifs.
La pension de réversion s’élève, pour le régime complémentaire, à 60 % et
de ce que l’assuré touchait ou aurait touché. Elle n’est pas soumise à des conditions
de ressources et peut donc être librement cumulable avec toute autre retraite
personnelle du conjoint survivant.
Le poids
relatif de la réversion est amené à diminuer
Le poids relatif de la réversion au sein des dépenses de retraite devrait passer
de 12 % à 8,8 % entre 2014 et 2060. L’augmentation des pensions des femmes
explique cette évolution. En effet, le taux d’activité des femmes de 15 à 64
ans était de 67,6 % en 2015 contre 58,2 % en 1990. Sur la même période, le taux
d’activité des hommes est resté stable (passant de 75,9 à 75,5 %). L’écart de
rémunération avec les hommes tend également à se réduire. La meilleure prise en
compte des périodes de maternité permet, par ailleurs, d’augmenter les droits à
la retraite des femmes. Selon l’INSEE, si la pension de droit direct des femmes
nées en 1930 ne représente en moyenne que 53 % de celle des hommes de la même
génération, celle-ci atteindrait 81 % pour les femmes nées en 1970.
Une partie de droits de réversion étant soumis à une condition des
ressources, l’augmentation des revenus propres des femmes devraient conduire à
ce qu’elles en profitent moins que dans le passé.
Le poids relatif de la réversion baissera également en raison de la
diminution des différences d’âge entre les conjoints. En outre, l’écart de
l’espérance de vie entre les hommes et les femmes tend à s’amenuiser.
Ces différents points amènent certains experts et responsables de la
protection sociale à poser la question de l’utilité à terme des pensions de
réversion.
La réversion
chez nos partenaires
La Suède
En 1990, au niveau du régime par répartition, les pensions de réversion
(dite pension de veuvage) ont été supprimées en Suède pour les générations
futures de veufs et veuves. La suppression s’est faite de manière progressive
avec une pleine application du nouveau dispositif pour les générations nées à
partir de 1945.
La pension d’ajustement
Depuis 1990, les conjoints survivants âgés de moins de 65 ans peuvent
néanmoins bénéficier d’une pension dite d’ajustement ou transitoire. Cette
pension est accessible aux partenaires « enregistrés » ainsi qu’aux concubins
ayant donné naissance à un enfant. Le concubin survivant peut également
bénéficier de cette pension s’il a déjà été marié ou partenaire enregistré du
défunt par le passé.
La pension d’ajustement, versée pendant un an au survivant, correspond à
fraction des droits du conjoint décédé (au taux de 55 %). Cette prestation est
censée aider la veuve (ou le veuf) à s’adapter à sa nouvelle situation. En cas
d’enfants à charge, la durée de versement est prolongée de 12 mois ou jusqu'à
ce que le plus jeune des enfants atteigne l'âge de 12 ans.
La pension garantie
En cas d’insuffisance de cette pension, une pension garantie peut être
versée en complément. Son montant est déterminé en fonction du nombre d’années
que le défunt a vécu en Suède.
La réversion dans le cadre de la capitalisation
Les actifs nés après 1938 ont la faculté de souscrire à une pension de
réversion au titre de leur retraite par capitalisation. Dans ce cas, la rente
perçue par le conjoint survivant au titre de la retraite professionnelle ou de
la retraite privée est calculée sur la base des revenus du travail perçus par
le défunt à la date de son décès.
L’Allemagne
L’Allemagne dispose d’un système pluriel de pensions de réversion. Il a été
profondément réformé en 2002. Les assurés allemands peuvent accéder, sous
certaines conditions, à un dispositif d’assurance avec le versement d’une
pension de réversion, à un dispositif d’assistance temporaire et à un
dispositif de partage entre conjoints des droits à la retraite (splitting).
La pension de réversion n’est pas réservée exclusivement aux couples
mariés. Elle est ouverte au conjoint, partenaire pacsé et sous certaines
conditions au conjoint divorcé. Le survivant doit pouvoir justifier d’une année
d’union pour pouvoir bénéficier de la pension de réversion. Si le mariage a eu
lieu avant le 1er janvier 2002, la condition de durée ne s’applique
pas. En cas remariage, la pension est suspendue mais une indemnité forfaitaire
est versée au survivant.
Pour pouvoir prétendre à la pension de réversion du défunt, le conjoint
décédé devait soit déjà percevoir une retraite avant son décès soit avoir
accompli une période minimum d'affiliation de cinq ans.
Deux prestations de réversion existent en Allemagne, la « petite pension »
et la « grande pension ».
La grande pension de veuvage est versée de façon permanente après les 45
ans révolus du survivant. L’âge de versement sera progressivement porté à 47
ans avec une application pleine en 2029. Elle peut être versée avant si le
survivant a, à sa charge, un enfant personnel ou un enfant du défunt qui n’a
pas atteint l’âge de 18 ans révolus. La grande pension s’élève à 55 % de la
retraite de l’assuré décédé (avant 2002 le taux était de 60 %). La législation
allemande permet également un versement anticipé de la pension de veuvage, si
le survivant a une capacité de travail réduite.
A défaut de pouvoir bénéficier de la « grande pension », le
conjoint survivant peut prétendre à la « petite pension » appelée aussi «
pension réduite », servie pendant 24 mois maximum à la suite du décès. La petite
retraite correspond à 25 % de la retraite de l’assuré. Pour les couples nés
avant le 2 janvier 1962 et mariés avant le 1er janvier 2002, la petite retraite
est servie sans limitation de durée. La pension de réversion peut être versée
en capital.
Les ressources du survivant, tels que le salaire, les revenus du capital et
d'autres revenus provenant d'une activité de travail salarié seront
partiellement décomptés de la pension. L'abattement mensuel non imputé sur la
pension est lié à la valeur actuelle de la pension. Pour les orphelins, cet
abattement s'élève à 17,5 fois la valeur actuelle de la pension et à 26,4 fois
pour tous les survivants et pour les bénéficiaires de la pension d'éducation.
Si le revenu personnel est plus élevé que l'abattement, 40 % des revenus nets
restants seront décomptés de la pension de réversion.
Le veuf ou la veuve qui élève des enfants reçoit un supplément (2 points de
rémunération pour le premier enfant puis un point par enfant pour les
suivants). Si le couple est séparé, il existe normalement une compensation des
droits acquis aux époux divorcés qui sera prise en compte dans les droits
ultérieurs à la pension.
Le partage des droits à pension : le « splitting »
L’introduction du splitting constitue une des grandes nouveautés de la
réforme de 2002. Sur accord des conjoints, les droits à la retraite sont
mutualisés. En cas de divorce ou de veuvage, le ou les conjoints bénéficient de
la moitié des droits constitués quel que soit son niveau de ressources. Le
système allemand fonctionnant par points, depuis 2002, le partage est simple à
réaliser.
Pour bénéficier de la règle du splitting, les deux conjoints doivent avoir
cotisé à l'assurance retraite obligatoire pendant au moins 25 ans et le mariage
doit être postérieur au 1er janvier 2002. Les couples âgés de moins de 40 ans
et déjà mariés avant l’entrée en vigueur de la réforme peuvent également
bénéficier de ce dispositif.
L’analyse en termes d’économies n’est pas évidente car la mutualisation des
droits aboutit à les cristalliser quelles que soient les ressources des
conjoints. En revanche, ce dispositif permet d’améliorer sensiblement les
revenus des conjoints.
Le Royaume-Uni
Depuis 1999, les pensions de réversion sont versées de manière temporaire.
L’objectif étant de lisser les effets financiers d’une séparation ou d’un
décès, le régime britannique prévoit plusieurs prestations dans le cadre de
l'assurance décès en faveur des proches du défunt :
- Un
capital-décès (Bereavement payment),
- Une
allocation-décès (Bereavement allowance)
- Une
allocation pour parent survivant (Widowed parent's allowance)
Ces prestations peuvent être attribuées au conjoint survivant non séparé de
droit ou de fait. Peuvent en bénéficier les survivants liés par un contrat de
mariage ou par un pacte civil légal.
Quelles que soient les prestations servies, le défunt doit avoir versé des
cotisations sociales à l'assurance nationale pendant une certaine période.
Cette condition d'affiliation est écartée lorsque le décès résulte d'un
accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
Le capital-décès forfaitaire
Le capital décès est fixé à 2000 livres sterling pour l’année fiscale
2014-2015. Il est exonéré d’impôts. Il est attribué au conjoint survivant quand
l'une des deux conditions est satisfaite :
- le
conjoint survivant n'avait pas atteint l'âge légal de la retraite au
moment du décès ;
- la
personne décédée n'était pas bénéficiaire d'une pension nationale de
vieillesse au moment du décès.
Par ailleurs, le défunt doit avoir versé des cotisations ou doit être
décédé à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
L’allocation décès est accordée au conjoint ou partenaire survivant, sans
enfant à charge, âgé d'au moins 45 ans au moment du décès. Si le conjoint
survivant a atteint l’âge de la retraite au moment du décès de l’assuré, la
pension peut faire l’objet d’une réévaluation.
L'allocation-décès est versée pendant 52 semaines maximum à compter de la
date de décès du conjoint.
Le montant de l'allocation dépend de deux facteurs :
- Le montant
des cotisations versées par le défunt
- L'âge du
conjoint survivant au moment du décès
Allocation pour parent
survivant (Widowed Parent's Allowance)
L'allocation pour parent survivant est une prestation hebdomadaire versée
au veuf ou à la veuve n'ayant pas atteint l'âge légal de la retraite et
percevant l'allocation pour enfant (Child benefit) du fait de la prise en
charge d’un enfant ou plus.
En cas d’extinction du droit à l’allocation pour parent survivant avant un
délai de 52 semaines (par exemple parce que l'enfant n'ouvre plus droit à
l'allocation pour enfant), le conjoint ou partenaire survivant âgé d'au moins
45 ans sans avoir atteint l'âge légal de la retraite peut demander à bénéficier
de l’allocation décès pour le restant des 52 semaines.
L’Italie
En Italie il faut distinguer la pension de réversion de la pension
indirecte.
La pension de réversion
La pension de réversion est versée au survivant quand le conjoint décédé
était titulaire d’une pension de retraite directe.
La pension indirecte
Quand le travailleur décédé n’était pas titulaire d’une pension directe, il
peut bénéficier d’une pension indirecte si, au moment de son décès, il remplissait
les conditions requises en matière d’assurance et de cotisation pour toucher
l’allocation ordinaire d’invalidité ou la pension d’incapacité, ou encore les
conditions requises pour avoir droit à la pension de vieillesse.
Pour bénéficier de la pension indirecte, le travailleur décédé doit
justifier d'une période de cotisations d'au minimum 15 ans (soit 780 semaines)
durant sa vie active ou justifier d'une période de cotisation d'au minimum 5
ans (soit 260 semaines) dont au moins 3 ans (soit 156 semaines) durant les 5
années précédant la date du décès.
La pension de réversion et la pension indirecte sont versées sans condition
d’âge et par ordre de priorité au :
- conjoint
survivant, même séparé, à condition qu'il bénéficie du versement d'une
pension alimentaire conformément à une décision de justice ;
- conjoint
divorcé non remarié s’il a droit à une allocation de divorce ;
- enfants
mineurs à la date du décès, invalides, étudiants et à la charge du défunt
au moment du décès (la limite d’âge est de 21 ans en cas d'études à temps
plein, 26 ans en cas d'études universitaires. En cas d’enfant(s)
invalide(s), la limite d’âge ne s’applique plus) ;
- petits-enfants
mineurs (au même titre que les enfants) s'ils étaient entièrement à la
charge des grands-parents (grand-père ou grand-mère) à la date du décès.
En cas de remariage du conjoint survivant
Le droit à pension du conjoint survivant cesse en cas de remariage. La
pension est alors remplacée par une indemnité à versement unique correspondant
à 2 annuités.
S'il n'existe pas d'autres survivants (conjoint ou enfants) ouvrant droit à
pension :
- les
parents à charge qui au moment du décès de l'assuré étaient âgés d'au
moins 65 ans et ne percevaient aucune pension ;
- les frères
ou sœurs non-mariés et invalides si au moment du décès de l'assuré ils
étaient à sa charge.
Quel avenir
pour la réversion en France ?
Au milieu du mois de juin, a été évoquée une éventuelle suppression du
dispositif de la réversion dans le cadre du futur régime universel de retraite.
Le Haut-Commissaire en charge de la réforme a, vendredi 22 juin, rejeté toute
idée de suppression de la réversion. Néanmoins, Bruno Le Maire, le 24 juin a
annoncé qu’elle ferait l’objet dans le cadre de la réforme de la retraite d’une
refonte. En soi, cette déclaration est assez logique, la création d’un régime
universel passe également par l’harmonisation des règles en vigueur pour la
réversion.
La réversion obéit-elle à une logique de redistribution sociale ou à une
logique quasi patrimoniale. A-t-elle comme objectif de garantir un minimum de
revenus au conjoint survivant, ou de lui assurer le maintien de son niveau de
vie ? Est-elle la prise en compte du travail du conjoint survivant à la
carrière du conjoint décédé ? La réversion est par nature une prestation
redistributive. En effet, le conjoint survivant bénéficie de droits constitués
par une tierce personne. A ce titre, les experts de certains organismes comme
l’OCDE préconise que la réversion soit financée par des ressources spécifiques.
Les pistes envisageables
pour le Gouvernement
Le Gouvernement a confirmé, fort logiquement, le maintien des pensions de
réversion pour les actuels bénéficiaires. Pour l’avenir, il a exprimé le
principe d’une plus grande justice sociale dans la distribution de ces pensions.
Au nom de l’équité, de la transparence et de la simplification, les
conditions et les dates d’octroi seront harmonisées. Le plafonnement en
fonction des ressources devrait être généralisé. En revanche, le taux de la
réversion pourrait être augmenté pour les bénéficiaires. La suppression de la
réversion en cas de remariage pourrait être supprimée. La réversion ne devrait
plus être versée qu’à un seul bénéficiaire quand la personne décédée a eu
plusieurs conjoints, comme cela peut être le cas dans certains régimes. La
pension serait calculée au prorata des unions et répartie entre le conjoint et
les ex-conjoints.
Une extension de la réversion à l’ensemble des unions ayant fait l’objet
d’une notification ou d’un enregistrement serait en phase avec la logique de
l’assurance-vie qui permet à l’assuré de choisir ses bénéficiaires. L’ouverture
du droit à réversion aux couples non mariés suppose une application stricte de
la règle de proratisation des droits en fonction des durées de vie commune. Le
principe de proratisation, déjà appliqué au titre des pensions de réversion
distribuées par l’AGIRC et l’ARRCO, devrait de ce fait être étendu à tous.
L’autre voie de réforme consisterait en prenant exemple sur les systèmes
allemand ou canadien, d’opter pour un partage des points à la retraite au sein
du couple. Dans ce cadre, le compte de retraite est conjugalisé. Les points
accumulés durant la vie professionnelle sont additionnés et permettent de
calculer le montant de la pension. En cas de séparation, les points sont
partagés.
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